Il est nécessaire de comprendre que la rétrognathie présente chez le nouveau-né est physiologique. Elle doit tendre vers 6 ans à une relation de classe avec l’arrivée des molaires définitives. Mais les dysfonctions peuvent perturber ce développement. Comment ?
Article tiré du reportage » 11e symposium international ostéopathique de Nantes : Prise en charge pluridisciplinaire des troubles du sommeil » publié dans L’ostéopathe magazine #33 (Juin-Juillet-Août 2017)
Les fonctions de la sphère oro-faciale (ventilation nasale, succion-déglutition, préhension-morsure, mastication bilatérale alternée, la posture linguale de repos) font office de stimulateurs de croissance permettant de déverrouiller la distocclusion initiale. L’apparition de dysfonctions (linguale par exemple) et/ou de parafonctions (tic de succion, biberon tardif, ventilation buccale) va venir perturber ce schéma de développement. Il est alors important de faire un travail d’explications et d’accompagnement des parents et du jeune enfant pour retrouver ces normo-fonctions.
Il apparait que l’âge idéal de prise en charge est compris entre 2 ans et demi et 6 ans. Il nous faut rechercher toutes les données subjectives et objectives pour ne négliger aucun facteur. La prise en charge fonctionnelle orthophonique préventive en première intention vers 3 ans se base sur quelques séances de guidance et conseils prophylactiques. Le but est de renforcer les stimulateurs de croissance et lutter contre les parafonctions et les dysfonctions. Il s’agit éventuellement d’utiliser des éducateurs fonctionnels (intercepteurs labiaux, écrans buccaux, etc.) et des douches nasales pour aider à la respiration nasale. Passé l’âge de 5 ans, une prise en charge orthophonique complète associée à de l’éducation fonctionnelle, de l’éveil sensori-moteur et une normalisation des dyskinesthèses peut être envisagée.
[su_pullquote align= »right »]« Les enfants souffrant de ces troubles ne restent pas à table, car ils n’éprouvent pas de plaisir à manger puisqu’ils ne sentent pas bien les aliments »[/su_pullquote]
Pas de plaisir à manger
Les enfants souffrant de ces troubles ne restent pas à table, car ils n’éprouvent pas de plaisir à manger puisqu’ils ne sentent pas bien les aliments. De même, les aliments trop mous ne permettent pas au stimulateur de croissance de la mastication bilatérale alternée d’être efficace. Il faut donc savoir aussi introduire différentes textures dans l’alimentation. En somme, il faut lutter contre certaines habitudes alimentaires courantes aujourd’hui. Pour être le plus efficace possible, il faut dépister les enfants concernés, conseiller les parents et les enfants. Et surtout travailler en synergie entre professions concernées. Pour être le plus efficace possible, il faut dépister les enfants concernés, conseiller les parents et les enfants. Et surtout travailler en synergie entre professions concernées.
Propulseurs mandibulaires que faire ?… Et ne pas faire !
Nos patients sont parfois équipés de propulseurs mandibulaires. Il semble qu’il existe une multitude de propulseurs disponibles. Mais combien sont réellement efficaces et pour quelles indications ?
Sylviane Raskin, orthodontiste à Liège (Belgique)
Le but du propulseur mandibulaire est de permettre l’avancée de la mandibule afin de libérer l’espace en arrière en avançant le corps de la langue. L’idéal est un modèle qui respecte les mouvements naturels de la mandibule et qui est adapté au patient. Ce n’est pas toujours simple, car ce ne sont pas les plus accessibles financièrement. Nous allons détailler les différents modèles disponibles ainsi que les difficultés ou les avantages de chacun d’eux. Les modèles universels type somnofit sont peu onéreux et intéressants en cas de gros décalage mandibulo-maxillaire. Thermoformables, ils sont peu évidents à l’usage pour les patients souffrant de SAOS car ils sont respirateurs buccaux. Ils seront parfois difficilement supportés par ces patients et seule une taille unique est proposée. Ils demeurent intéressants pour éventuellement faire un essai. Le modèle sur-mesure existe en deux types de modèles.
- Le modèle monobloc possède les mêmes désavantages que le modèle universel hormis la possibilité de modifier la taille de l’orthèse. Il va gêner les respirateurs buccaux.
- Le modèle bi-bloc est un peu plus adapté. Il existe des modèles en retenue ou en pousse avec une charnière. Cependant, il faut que l’orthèse soit la plus fine possible pour éviter les risques de bruxisme et pour laisser à la langue une place suffisante.
Les effets secondaires des propulseurs
Ces propulseurs ne sont pas dénués d’effets secondaires. Les premiers jours, on observe un serrage dentaire et une hypersalivation qui cèderont à l’usage. En fonction du dosage de la propulsion, il est possible de trouver des douleurs dentaires, parfois musculaires si le patient fait lui-même son réglage. Il est possible aussi de voir apparaitre une malocclusion si la prothèse est mal adaptée. Voire, une perte de dent si l’orthèse n’est pas bien faite. L’apparition de parodontite est souvent le résultat d’une indication mal posée. Il s’agit donc de savoir comment ces propulseurs ont été mis en place et quel type de modèle a été utilisé. Cette piste de traitement ne doit pas être négligée, mais il faut rester attentif aux effets indésirables pour ne pas laisser d’autres problématiques s’installer chez le patient.
[su_quote]« L’éducation fonctionnelle a pour but de restaurer les fonctions physiologiques pour supprimer les contraintes néfastes et permettre à la croissance de s’exprimer. C’est une vision holistique de l’orthodontie » [/su_quote]
Les éducateurs fonctionnels dans la prévention orthodontique des troubles respiratoires du sommeil
Il faut comprendre le principe du couloir dentaire qui est la résultante d’un équilibre entre la langue qui pousse les dents vers l’extérieur et les muscles buccinateurs et orbiculaires qui les repoussent vers l’intérieur. Mais aussi la poussée mésiale des dernières molaires à D et à G qui vont s’annuler au niveau des incisives. Ainsi le placement des dents n’est pas seulement le résultat d’un positionnement, mais aussi la conséquence de facteurs musculaires.
Les dysfonctions, par les contraintes qu’elles engendrent, contribuent à déformer les arcades dentaires et influencent négativement la croissance maxillo-faciale. Les dysmorphoses sont donc le reflet d’un certain degré de dysfonction.
Il n’y a pas de typologie faciale liée au SAHOS
La (ré-)éducation des dysfonctions va permettre :
- à la croissance de s’exprimer sans contrainte,
- un changement de forme de l’arcade dentaire, mais aussi de l’occlusion,
- une amélioration fonctionnelle de l’individu.
Il est possible d’employer des écrans buccaux et des gouttières myofonctionnelles pour agir sur la croissance maxillo-mandibulaire dans les trois plans de l’espace. Il en résultera une harmonisation des tissus mous. Il n’existe pas actuellement de typologie faciale liée au SAHOS comme pour d’autres troubles de l’articulé dentaire. Mais toute dysmorphose favorisant une position postérieure de l’os hyoïde est considérée comme favorable à l’apparition du syndrome. L’éducation fonctionnelle a pour but de restaurer les fonctions physiologiques de la zone oro-faciale pour supprimer les contraintes néfastes et permettre à la croissance de s’exprimer. Cette approche est issue de la philosophie bioprogressive de Ricketts. C’est une vue holistique de l’orthodontie (au-delà des dents). Les traitements sont individualisés et il s’agit de prendre en charge les enfants dès le jeune âge.
Gisèle Hannot, orthodontiste à Liège (Belgique)
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