Pierre-Marie Gagey est docteur en médecine, président honoraire de l’Association. Il a contribué à la mise en oeuvre des plateformes de stabilométrie et à la mise en place de leurs normes. Il participe également au développement de la posturologie.
Propos recueillis par Jérémie Cogan
D’où vient votre intérêt pour la posture ?
J’étais médecin du travail du bâtiment et des travaux publics. Avec 300 000 patients par an, cette activité était parfaite pour observer la santé publique. Les erreurs médicales sont facilement repérables et le nombre de traumatismes crâniens y est important : 10 % des consultations ! J’avais alors pu constater que la médecine ignorait les séquelles des traumas crâniens. Le terme de « syndrome subjectif » datant de 1916 reste employé. À tort (voir notre reportage sur l’histoire de la posturologie). Dans les années 70, je découvrais les recherches de Jean-Bernard Baron. C’est à ce moment que tout a commencé.
Comment ces travaux ont-ils été un élément déclenchant ?
L’histoire de la posturologie a commencé très tôt. Des médecins et neurologues avaient su bâtir un modèle reliant des signes cliniques et des atteintes du système nerveux. Dans ce modèle, plus l’atteinte de la structure est importante, plus la lésion sera sévère. Mais en 1955, les travaux de Jean-Bernard Baron, ophtalmologiste français et chercheur au CNRS, donneront naissance à un nouveau paradigme avec sa thèse sur les vertiges des patients hétérophoriques. J’ai alors compris la notion de temporalité et de non-linéarité à la base de la posturologie.
Quel est ce nouveau paradigme ?
À travers un protocole expérimental simple, il a provoqué une hétérophorie* chez des poissons. En sectionnant seulement une ou deux fibres des muscles oculomoteurs, il obtenait un impact important sur l’animal qui se retrouvait en hypertonie, le corps incurvé et ne pouvant nager qu’en faisant des ronds. Alors que les poissons sur lesquels le muscle avait été entièrement sectionné (par une erreur de manipulation) étaient peu, voire, non perturbés dans leurs mouvements. Le déséquilibre oculomoteur était donc énorme quand on ne coupait que quelques fibres. Un résultat surprenant que personne n’avait prédit. Le modèle du système postural prend forme. Il est dynamique et non linéaire.
* L’hétérophorie est un strabisme latent constaté lorsque les yeux sont au repos physiologique découvert en 1860 par Hermann Ludwig von Helmholtz. Il s’agit d’une déviation pathologique des globes oculaires n’apparaissant que lorsque la vision des yeux est dissociée. Elle est due à l’atonie d’un ou plusieurs muscles oculomoteurs.
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