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Portrait de Serge PAOLETTI, DO

Paroles d’Ostéopathes. La philosophie, l’esprit et l’art de l’ostéopathie.

SERGE PAOLETTI, D.O. (GB)

Diplômé en Kinésithérapie, D.E., France (1973)

Diplômé en Ostéopathie de l’ESO, Maidstone, Grande-Bretagne (1983)

Enseignant au CIDO, au WSO, au COF Paris, au CSO Rome et à l’ESO Maidstone

Membre fondateur de l’Académie d’Ostéopathie de France

Président d’honneur du dispensaire DONE

Auteur, professeur et conférencier international

  1. Comment êtes-vous venu à l’ostéopathie ?

J’ai obtenu mon diplôme de kinésithérapeute en 1973. À ce moment-là l’ostéopathie était peu connue en France, et personnellement, non seulement je n’avais aucune idée de ce que cela pouvait être mais je n’en avais jamais entendu parler. Cependant, mon diplôme obtenu, je n’étais pas particulièrement enthousiaste pour exercer la kinésithérapie et j’étais donc prêt à explorer d’autres voies.

Le « hasard » se présenta une première fois à travers la rencontre d’un ancien camarade, lui aussi kinésithérapeute, qui me fit part de l’existence d’un cours d’ostéopathie, dont lui-même ignorait les fondements, mais ma curiosité fut éveillée et je décidai « d’aller voir »…

Il faut dire qu’à cette époque l’ostéopathie était à ses débuts en France, et il n’existait aucune école vraiment structurée. J’ai par la suite suivi trois ans de cours, peu satisfait du résultat, mais le penchant pour l’ostéopathie était pris !

Le « hasard », une deuxième fois, se présenta par l’intermédiaire d’un confrère qui avait entendu parler d’une école d’ostéopathie en Angleterre qui dispensait un enseignement de qualité.

Évidemment je me suis inscrit à l’ESO (European School of Osteopathy) à Maidstone et j’ai suivi un nouveau cursus de cinq ans au bout duquel j’ai abandonné définitivement la kinésithérapie au profit de l’ostéopathie.

Mon diplôme de l’ESO obtenu, j’ai fait comme beaucoup de confrères qui cherchaient leur voie, j’ai participé à diverses formations : énergétique, auriculothérapie, réflexologie, etc., pour finalement m’apercevoir que l’ostéopathie était la voie qui me convenait le mieux et qui m’enthousiasmait.

  1. Que trouvez-vous le plus merveilleux en ostéopathie ?

Ce qui est extraordinaire dans notre profession c’est que grâce à nos connaissances et à l’habileté de nos deux mains nous soyons capables de soigner quelqu’un, sans aucune assistance extérieure, et ce, où que ce soit et sans même comprendre la langue de la personne traitée.

Je ne sais pas si tout le monde en est conscient, mais l’ostéopathie est la seule médecine qui ne demande aucun adjuvant pour s’exercer, et c’est en soi quelque chose d’assez extraordinaire.

Une autre chose enthousiasmante en ostéopathie est liée au fait que nous ne connaissons pas ses véritables limites, et que par l’enrichissement de nos connaissances et l’expérience acquise auprès de nos patients, nous découvrons que nos possibilités thérapeutiques sont constamment repoussées.

Jusqu’où ? Je l’ignore.

Ce qui repousse ces limites, ce sont les nouvelles recherches scientifiques que nous intégrons dans notre pratique quotidienne et qui nous permettent de « décoder » un peu mieux la complexité du corps humain.

J’entends par là les nouvelles connaissances en embryologie, notamment les phénomènes biodynamiques embryologiques, les nouvelles données sur l’épigénétique, l’étude des fascias, la corrélation entre fascias et chakras, etc.

Ce qui est motivant dans toutes ces nouvelles connaissances, c’est le fait que l’ostéopathie ne soit pas une médecine figée, établie sur des fondements immuables, mais qu’au contraire elle soit évolutive, tant sur le plan théorique que pratique.

C’est ce côté pratique qui doit être le but final de notre exercice, nous sommes avant tout des cliniciens, et notre objectif premier est de soulager nos patients, et ce, du mieux possible.

  1. Avez-vous une anecdote significative que vous aimeriez nous raconter ?

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Lorsque j’étais étudiant, j’avais comme enseignant une personne de grande expérience et qui possédait une immense culture médicale dans tous les domaines, je veux parler de Tom Dummer, un des fondateurs de l’ESO.

Tom parlait français, avec un charmant accent anglais inimitable, mais d’une voix si monocorde que par moments on avait tendance à se déconnecter et donc à recevoir son discours par intermittence.

J’avais beaucoup d’estime et de respect pour Tom. Une fois mes études terminées, j’ai eu la chance de devenir enseignant à l’ESO et, par ce fait, de continuer à côtoyer Tom et d’avoir de longues et intéressantes discussions professionnelles avec lui.

Un jour que je lui demandais un éclaircissement sur l’ostéopathie, tout en voulant savoir pourquoi il n’avait pas développé plus amplement l’explication sur ce point durant ses cours, j’eus la réponse qui me fit le mieux comprendre la dimension de cet enseignant : « Tout simplement parce que vous ne me l’avez pas demandé. »

J’ai compris alors que Tom était un véritable maître, qu’il savait susciter la curiosité de l’étudiant, mais que c’était ensuite à celui-ci de montrer son intérêt pour le sujet et de continuer à chercher plus loin pour enrichir sa réflexion et sa compréhension, et ainsi devenir un acteur actif de sa profession.

  1. Comment décririez-vous votre approche ostéopathique ?

L’exercice de notre art ne peut être qu’holistique. J’entends par là que l’ostéopathie est incompatible avec la « spécialisation » exclusive : on ne peut être ostéopathe pour les sportifs, pour les bébés, pour les femmes enceintes, biodynamicien, etc. On est ostéopathe, point; ce qui ne veut pas dire qu’il ne faille pas constamment améliorer notre savoir et notre compréhension.

Ce qui sous-entend également qu’on n’est pas ostéopathe structurel, viscéral, fascial, biodynamicien ou quantique… mais tout cela à la fois, et que toutes ces différentes techniques ont leur utilité et leur efficacité, à condition de bien les maîtriser.

Still disait que lorsque nous faisons entrer quelque chose de nouveau dans le concept ostéopathique, c’est un peu d’ostéopathie qui s’en va. Je pense qu’il avait raison sur un certain point mais que son discours doit être nuancé.

Si nous introduisons une approche ou compréhension nouvelle dans le concept ostéopathique, et cela, aux dépens des matières de base comme l’anatomie, la physiologie… alors nous pouvons dire que dans ce sens Still avait entièrement raison.

Mais comme l’ostéopathie est évolutive, notamment grâce aux nouvelles recherches qui nous permettent de mieux comprendre la complexité du corps humain, obligatoirement nous devons introduire dans le concept ostéopathique de nouvelles approches.

Cela ne veut pas dire que ces nouvelles approches doivent devenir exclusives ; elles doivent seulement trouver leur juste place dans le concept ostéopathique, sans que ce soit aux dépens des fondements qui restent essentiels, et bien entendu évolutifs.

La définition de l’ostéopathie a longtemps été floue. L’hostilité à son égard de la plupart des médecins qui la considéraient comme du charlatanisme a contribué à introduire le trouble dans l’esprit des ostéopathes qui ne savaient où se situer dans le contexte médical. Actuellement l’ostéopathie a fait largement la preuve de son efficacité. Si bien que les critiques à son égard sont des combats d’arrière-garde, des réticences corporatives, et ceux qui la dénigrent n’ont souvent aucune idée de ce qu’elle est vraiment, et sont donc incompétents pour en parler.

Je pense que la définition la plus simple et la plus proche de la réalité est de la considérer comme une médecine manuelle.

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À ce titre elle présente un enseignement de base commun à toute médecine : anatomie, physiologie, pathologie, embryologie… et en cela, il n’y a rien qui puisse la faire considérer comme une médecine de second ordre, sauf si on a établi que les sciences de base sont bonnes pour certains et charlatanesques pour d’autres.

Cependant l’ostéopathie possède sa propre spécificité, dans sa manière de concevoir les modalités thérapeutiques ; elle possède également un langage spécifique et sa propre philosophie.

Notre pratique est aussi spécifique du fait qu’elle soit essentiellement manuelle et qu’elle considère systématiquement le traitement du patient dans un contexte de globalité, quelle que soit la pathologie.

Nous soignons un patient et non pas une maladie. En effet, comment concevoir qu’une partie du corps puisse fonctionner indépendamment du reste sans aucun lien ? À la réflexion, cela n’a aucun sens ! Ce lien est mécanique, fluidique, neurologique, mais aussi psychosomatique, et il est donc impossible de segmenter sans tenir compte de tous les paramètres.

Cela étant établi, il faut constamment garder en mémoire que les bases de notre pratique sont la connaissance de l’anatomie, de la physiologie et de la pathologie, auxquelles nous ajoutons l’art de la palpation qui permet l’évaluation de la mobilité.

Le fondateur de l’ostéopathie, A.T. Still, auquel tous les ostéopathes se réfèrent, a toujours considéré l’anatomie comme étant le pilier principal de l’ostéopathie, et je pense qu’à ce titre il avait entièrement raison et que nous ne pouvons déroger à cela.

Le système musculo-squelettique est non seulement le support mécanique du corps, mais également le support des systèmes physiologiques, vasculaires et nerveux, et donc le lieu qui nous permet d’avoir accès à la globalité.

Si nous considérons que le système musculo-squelettique découle du mésoderme et que celui-ci est avant tout du fascia, nous pouvons facilement concevoir que le corps humain soit constitué pratiquement de fascia, au sein duquel nous trouvons 50 à 60 % de liquide, et il n’est pas difficile de comprendre qu’effectivement à travers ce support nous ayons pratiquement accès à toutes les fonctions.

  1. Puisque vous avez ici carte blanche, qu’aimeriez-vous dire à vos lecteurs, étudiants en ostéopathie ou ostéopathes ?

 

[aesop_quote type= »pull » background= »#c0c0c0″ text= »#000000″ width= »40% » align= »left » size= »1″ quote= »Un des facteurs les plus importants dans l’enseignement est d’éveiller la curiosité et la réflexion de l’étudiant, et de l’inciter à aller plus loin dans sa quête de savoir. Sans cette réflexion, le futur ostéopathe accumulera une quantité énorme d’informations, dont souvent il ne saura que faire une fois ses études terminées, et il se trouvera souvent démuni devant le patient. » parallax= »off » direction= »left »]

Actuellement l’ostéopathie est devenue un phénomène mondial et, qu’on le veuille ou non, elle va s’imposer dans tous les pays.

Et si elle est en train de s’imposer au niveau mondial, ce n’est pas par un effet de mode, mais bien par le fait que son efficacité et son utilité aient été reconnues.

Personnellement je pense que dans les pays où le système médical est encore déficient, elle devrait être développée en priorité, car elle constitue une alternative efficace et peu coûteuse, cette forme de médecine pouvant être pratiquée avec peu de moyens techniques.

Actuellement de nombreux pays n’ont pas encore accès à l’ostéopathie, faute de moyens, comme une partie de l’Amérique du Sud, de l’Afrique, du Moyen et de l’Extrême-Orient ; or c’est dans ces pays, où le réseau médical est très aléatoire, qu’elle serait le plus utile.

En tant qu’ostéopathes, nous avons un devoir de générosité et nous devons tout faire pour que les personnes exclues économiquement puissent également avoir accès à nos traitements.

Dans de nombreux pays, les traitements ostéopathiques sont donnés dans des dispensaires, mais notre action devrait se prolonger vers les pays les plus démunis afin qu’ils puissent également bénéficier de notre science et de notre appui pour la mise en place d’un enseignement de qualité, dont pourrait profiter toute la population, y compris les enfants qui sont l’avenir d’une nation.

L’ostéopathie est en pleine évolution et son rayonnement au niveau mondial ne fera que s’accroître.

Il ne fait aucun doute qu’elle trouvera sa juste place dans le milieu médical. L’engouement qu’elle rencontre maintenant dans le monde entier est le reflet de son utilité et de son efficacité. Le nombre d’ostéopathes à travers le monde ne fera qu’augmenter.

Nous exerçons un métier passionnant qui nous apporte de grandes satisfactions en raison de ses résultats. Cependant pour ce faire, il est nécessaire que l’enseignement soit de grande rigueur et d’excellente qualité.

L’ostéopathie n’est pas un plus, comme certains peuvent le croire, c’est une médecine à part entière qui demande une grande assiduité et des connaissances étendues et très pointues pour être exercée dans les meilleures conditions.

L’évolution de notre profession dépendra, en très grande partie, du dynamisme et de la qualité de ceux qui l’exercent et également de ceux qui l’enseignent, car c’est à travers le message que ces derniers véhiculent que va se forger l’orientation du futur ostéopathe.

Un des facteurs les plus importants dans l’enseignement est d’éveiller la curiosité et la réflexion de l’étudiant, et de l’inciter à aller plus loin dans sa quête de savoir. Sans cette réflexion, le futur ostéopathe accumulera une quantité énorme d’informations, dont souvent il ne saura que faire une fois ses études terminées, et il se trouvera souvent démuni devant le patient. Si accumuler des connaissances est indispensable encore faut-il savoir quoi en faire, comment les synthétiser et les intégrer dans l’art de soigner. N’oublions pas que c’est le corps qui a raison, que la théorie est au service du corps et qu’elle doit s’adapter à celui-ci, et non pas l’inverse.

Pour cette raison, l’ostéopathie ne pourra être qu’holistique. La segmenter en spécialités nous détournera des véritables fondements de notre profession et sera facteur de nombreuses désillusions.

  1. Que souhaiteriez-vous laisser derrière vous, à la fin de votre vie ? 

Mon expérience de plus de trente ans et le recul que je peux avoir m’incitent à être très positif quant à l’avenir de notre profession.

Le travail accompli par nos prédécesseurs, et par nos confrères actuels qui font évoluer l’ostéopathie, avec de grandes compétences techniques et scientifiques, nous incite à voir l’avenir avec sérénité et confiance.

En ce qui me concerne, il me paraît un peu prétentieux d’affirmer que je vais laisser quelque chose de durable derrière moi.

J’espère que la contribution que j’ai apportée à l’ostéopathie, par l’approfondissement de l’étude des fascias, ne restera pas en l’état, mais qu’elle sera reprise par de nombreux autres confrères pour faire évoluer le décodage de ce système complexe mais plein de promesses pour l’évolution de nos possibilités thérapeutiques.

J’essaye de montrer à travers l’enseignement que je dispense, que l’efficacité de notre traitement dépend avant tout de la qualité de l’enseignement, et de la rigueur du professionnel qui doit être en permanence en état de recherche, à l’écoute du patient, pour améliorer sa compréhension et élargir son champ thérapeutique.

Actuellement il existe encore trop d’« ostéopathies », je ne suis pas ostéopathe fascial, je suis ostéopathe tout simplement.

Il n’existe qu’une seule ostéopathie englobant diverses modalités d’orientation.

Un ostéopathe doit être à même de mettre en œuvre les différentes modalités thérapeutiques, il n’y pas de mauvaises techniques en ostéopathie, toutes ont leur utilité et leur efficacité, mais à condition de les appliquer à bon escient.

Je serais vraiment très heureux si ce message était entendu, et je suis persuadé que ce serait pour le plus grand bien de notre merveilleuse profession, pleine d’avenir, et qui nous réservera encore d’agréables surprises notamment dans son application thérapeutique.

Source : Paroles d’Ostéopathes, de Anne CANARELLI, D.O.

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